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Un processus de création complexe, diversifié et basé sur la réinterprétation

           Finalement, son parcours et son histoire permettent de retracer son cheminement vers la découverte de son processus de création ; un processus complexe, diversifié et basé sur la réinterprétation. Il dit d’ailleurs : « Creativity is how we corporate creation. »

 

            Vik Muniz est, en effet, un artiste polyvalent se servant de différentes techniques, d’où un travail très diversifié. Il confie d’ailleurs à ce propos : « I am a photographer when I photograph and a drawer when I draw… » Il est un artiste très productif, avec plusieurs centaines d’œuvres à son actif, alors qu’il n’a encore que 53 ans.

La diversité de ses œuvres passe aussi par une diversité des processus de création. Il est, par exemple, capable de réaliser des œuvres comme Earthwork. Pour cela, il fait d’abord appel à un conducteur d’engins qui creuse la terre avec une pelleteuse en suivant la forme qu'il a préalablement dessiné. Une fois le dessin réalisé, l’artiste monte à bord d’un avion, muni de son appareil photo. Le pilote survole alors le dessin en question à une hauteur adéquate pour la prise de photos qui est à ce moment réalisée par Vik Muniz lui-même. Pour cette œuvre, il se cantonne, donc, au rôle de photographe avec l'assistance de plusieurs personnes.

Il réalise aussi des œuvres telles que le Pre colombian coffe maker qui est une sculpture très simple qu’il conçoit seul à partir d’argile. 

Ou encore avec son œuvre Pictures of Garbage pour laquelle il travaille avec d’autres artistes qui l’assistent. Il est alors comme un architecte avec ces assistants qui substituent ses mains. Après avoir pris une photo d’une ou plusieurs personnes, il réalise avec l’aide de son équipe un dessin correspondant aux traits du ou des visages à partir de poussière. Le tout est entouré d’ordures récupérées dans une décharge. Les œuvres sont ensuite prises en photo par Vik Muniz. Leur taille est considérable. Dans la vidéo qui suit, lui et son équipe crée une des nombreuses Pictures of Garbage. Il s'inspire pour les poses de peintures célèbres. Une réinterprétation à la fois des matériaux et de l'Art.

Selon lui, « you have to invent ways of doing it ». Tous les moyens peuvent être exploitables pour confier ce qu’on a à dire, ces moyens, ces « ways » sont ses différents processus de création. C’est, d’après lui, la puissance de la métaphore, qu’il a d’abord subie sous la dictature brésilienne puis, domptée et adoptée.

 

            Malgré une grande diversité des techniques, on remarque qu’un élément ne varie pas. Au début de son travail, il y a toujours une matière première, un objet qui fait sens.

Il semble, de ce fait, être un héritier du ready-made. Il y a toujours chez Vik Muniz, bien sûr, un travail technique sur chacune de ses œuvres. L’objet initial subi une modification, mais son état d’origine est fondamental.

André Breton définit le procédé du ready-made comme un « objet usuel promu à la dignité d’objet d’art par le simple choix de l’artiste. », Dictionnaire abrégé du surréalisme. A Marcel Duchamp d’ajouter : « Ce n’est pas la question visuelle du ready-made qui compte. L’important c’est qu’il existe. C’est le principe. L’œuvre d’art n’est pas rétinienne. Elle n’est plus que matière grise. »

Et par sa réinterprétation des objets, des matières premières (les ordures, la terre,…) Vik Muniz donne une sens puissant à ses œuvres, il leur offre cette « matière grise ».

C’est notamment le cas avec son œuvre, Sugar Children. Suite à un séjour dans les Caraïbes, il décide de rendre hommage aux enfants qu’il a rencontré et qui travaillent dans les champs de cannes à sucre. Sa matière première est, par conséquent, le sucre. Le résultat est un hommage à leur courage face au travail forcé et une manière de protester. Sur un fond noir, il étale le sucre blanc et commence à dessiner à l’aide de son doigt, simplement, les visages de ces enfants qu’il a pris en photo. Le résultat est délicat, bouleversant et puissant.

Dans The Last Supper, la matière première est d’autant plus significative. Il reprend le tableau La Cène de Leonard de Vinci avec comme « peinture » du chocolat fondu. L’idée de mélanger l’imaginaire romantique et scatologique l’amuse beaucoup. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il réalise la même œuvre, mais en reproduisant le portrait de Freud. Il associe alors deux matériaux, deux bases : une œuvre célèbre et du chocolat. Il réinterprète sa réalité.

              Son processus de création peut d’ailleurs se résumer en une œuvre puissante : Waste Land. Littéralement « Le monde des déchets/ du gaspillage ».

Il s’agit d’un film documentaire dont il est l’acteur principal. Derrière la caméra, trois réalisateurs : la britannique, Lucy Walker, le brésilien João Jardim et l’américaine Karen Healy.

Le film remporte notamment un oscar en 2011 dans la catégorie du meilleur film documentaire ainsi que le prix du public international au festival de Sundance en 2010.

Le titre original en portugais rend plus justice à la démarche de l’artiste puisqu’il s’intitule « Lixo Extraordianrio » ou « Déchet extraordinaire ». Cette traduction rend compte de la volonté de faire du quotidien de ces « chiffonniers » quelque chose d’artistique. Un travail qui utilise des objets qui ont une fonction totalement différente pour ces personnes.

Pour cela, il passe plus de trois ans dans la plus grande décharge du monde, à Rio de Janeiro. Ces Pictures of Garbage sont vendues aux enchères et l’argent est reversé directement aux modèles des photos. Une représentation visuelle, pleine de poésie et de simplicité.

Le film documentaire raconte une belle histoire, une histoire humaine à travers un mélange de plusieurs arts puisqu’on retrouve le cinéma, la musique de la chanteuse Mary J. Blige et les œuvres de Vik Muniz. Une création qui est, aussi, participative, et qui montre une réalité difficile du monde contemporain. Elle éveille les consciences tout en faisant du Beau avec ce qui est considéré comme sale et laid. On retrouve ainsi tous les éléments constitutifs du processus de création de Vik Muniz, l’artiste, qui utilise l’aspect capitaliste du marché de l’art (la vente aux enchères) pour montrer sa représentation visuelle du monde qui nait de la découverte de la beauté dans le quotidien, dans la simplicité, le banal voire le laid.

Suite à la page "Comprendre son processus"

Key, Earthworks par Vik Muniz (2002)

Vidéo détaillant les différentes étapes du processus de création de Vik Muniz pour l'ensemble de son oeuvre Earthworks  (2002)

Pre-colombian coffee maker par Vik Muniz

Vidéo détaillant le processus de création d'une oeuvre de la série Pictures of Garbage par Vik Muniz (2008)

Sugar Children par Vik Muniz (1996)

Photographie The Last Supper de la série Pictures of Chocolate par Vik Muniz (1997)

Affiche du film Waste Land de Lucy Walker avec Vik Muniz (2011)

Extrait du tournage de Waste Land (2011)

Oeuvre de la série Pictures of Garbage par Vik Muniz (2008)

Bande annonce du film Waste Land de Lucy Walker avec Vik Muniz (2011)

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